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Crise au sommet de l’État/ Ouattara-Soro : ça ne va pas !
Publié le : 29 aout 2016 par Yacouba Doumbia

(Photo d'archives)
C'est la Lettre du Continent (Lc) qui a fuité l'information, dans sa dernière parution. Entre le président de la République, Alassane Ouattara, et son dauphin constitutionnel, ce n'est pas le grand amour.
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Selon le bimensuel, le patron de l'exécutif ne serait pas content du chef du Parlement, dont le nom a figuré dans des rapports des services de renseignements généraux, suite aux événements malheureux de Bouaké le 22 juillet dernier. De quoi s'agit-il?
Les abonnés à la Compagnie ivoirienne d'électricité (Cie) ont constaté une flambée du coût de leurs factures, depuis février 2016. L'affaire a fait grand bruit et obligé le chef de l’État à réagir le 1er mai 2016, lors de la célébration de la fête du travail. Alassane Ouattara avait annulé la dernière augmentation, annoncé un audit de la Cie et invité, au passage, la structure distributrice d'électricité à rembourser le trop perçu sur les factures précédentes aux populations. Ce qui, visiblement, n'a pas été fait, puisque les factures qui ont suivi ont provoqué l'ire des populations, qui sont descendues, pour certaines, dans les rues, pillant et saccageant les agences de la Cie. Yamoussoukro, Daloa, ...Tiassalé ont ouvert la marche. Bouaké l'a bouclée, avec plus de dégâts dont un mort.
Dans cette ville au centre de la Côte d'Ivoire, non seulement le siège de la Cie a été pillé et saccagé, mais bien plus, les manifestants s'en sont pris à la préfecture de police, un commissariat, une agence de banque, au siège du conseil régional et au domicile du maire, Djibo Nicolas. L'affaire venait de quitter le simple cadre d'une revendication sociale. Bouaké est bouclée et passée au peigne fin par les forces de sécurité et les fins limiers. Il y a des arrestations. La rumeur de l'implication de Guillaume Soro dans ces manifestations se répand dans la ville.
Ces piques d'Ham-Bak
Une cérémonie de pardon est vite organisée le vendredi 5 août 2016 par des cadres et élus de la commune, au cours de laquelle le ministre d’État, Hamed Bakoyoko, dont la rivalité avec Soro alimente la chronique, lance ces propos : « A Bouaké, au moment où les gens ont commencé à marcher, piller et saccager, on n’avait pas encore distribué les deuxièmes factures, donc tu as cassé pour quoi ? Tu n’as pas reçu de facture et c’est toi qui vas casser. Tu casses pourquoi ? Tu marches contre la Cie, tu vas casser la préfecture, le conseil régional, chez le maire. La préfecture, le conseil régional, chez le maire ont fait quoi dans le casse contre la Cie ? Tout ça, c’est des enjeux politiques, des manipulations politiciennes. Or la politique, les vieux nous ont dit qu’il ne faut pas te presser. Ce que Dieu veut pour toi, il va te le donner ».
Le premier flic ivoirien, en colère ce jour-là, enfonce : « Les gens ont tout fait, pensant qu'Alassane Ouattara n’allait pas être président, mais il est là. Le président Ouattara est indéboulonnable. Celui qui va s’amuser avec Ado, il va voir qu’il n’est pas tombé du ciel mais que c’est des hommes qui l’ont mis au monde. Respectons-nous un peu. Quand tu fais des bonnes choses, tu assumes, mais quand c’est mauvais, personne ne veut assumer. Personne ne peut dire que c’est «moi». Ils sont cachés et ils vous envoient. Après, on vient nous dire que c’est tel jeune, non, venez vous-mêmes dire que c’est vous. La politique, c’est la démocratie. Le jour tu veux être député, tu vas être candidat. Si on doit te voter, on te vote. Ce n’est pas en cassant qu’on va t’élire ». Propos on ne peut plus directs. Même si le nom du chef du Parlement n'est pas cité, les allusions sont pourtant claires.
La réplique de ''Soul to Soul''
C'est d'ailleurs pourquoi Guillaume Soro va dépêcher son collaborateur direct, son chef du protocole, Souleymane Kamaraté alias ''Soul to Soul'', à Bouaké pour gommer le passage d'Hamed Bakayoko. Celui-ci rencontre les jeunes, les femmes et les chefs de communautés pour leur dire sa part de vérité.
Le 18 août, ''Soul to Soul'' déclare, pendant une rencontre avec des leaders d'associations : « Ce que vous devez savoir, c'est qu'aujourd'hui, il y a deux camps. Le camp des profiteurs et le camp des lutteurs. Nous ne pouvons pas nous sacrifier pour poignarder le président de la République. Il faut remercier le président pour sa hauteur d'esprit. Avec l'effort que fait le président de la République, on ne peut s'amuser à mettre le bâton dans ses roues. Ils sont allés raconter des histoires au président de la République. Notre souci, c'est de l'aider. Personne ne peut accepter ce qui est arrivé à Bouaké. Plus jamais ça à Bouaké. Je vous charge de dire merci au président de la République qui a même envoyé le président de l'Assemblée nationale au Congo-Brazzaville le représenter, comme pour répondre aux profiteurs. Dites également merci aux ministres Amadou Gon et Ibrahim Coulibaly ».
Ces propos sonnent comme une réponse du berger à la bergère. C'est cette passe d'arme que vient de mettre au grand jour la Lettre du Continent. Le bimensuel révèle que la crise entre Soro et son ''père'' a atteint un niveau tel que lors du mariage de la fille d'Ibrahim Ouattara, frère cadet du chef de l’État, ''les deux hommes ont échangé une poignée de main glaciale''. La Lc ajoute aussi que ''l'entourage de Ouattara soupçonne Soro de vouloir torpiller le projet de vice-présidence dans la mesure où cette fonction de dauphin constitutionnel ne lui échoirait'' plus. Les proches du chef de l’État, avec qui nous avons échangé hier sur la question, sont formels : « Il n'y a pas de problème entre Alassane Ouattara et Guillaume Soro ». « Nous étions à la résidence le jour du mariage. L'ambiance était bon enfant. A aucun moment, nous n'avons senti un problème entre les deux hommes », laisse croire un proche de Ouattara, qui ajoute que le président de la République a appelé Soro pour lui demander de le représenter à la cérémonie d'investiture du président Dénis Sassou Nguesso au Congo-Brazzaville.
Dans l'entourage de Guillaume Soro, on s’attelle à démentir l'article de la Lc. Les cyberactivites proches du président de l'Assemblée nationale ont entamé, depuis hier, une offensive médiatique, photo à l'appui, pour discréditer l'article incriminant. Des photos de la cérémonie de mariage du frère cadet de Ouattara ont été diffusées pour montrer qu'entre Soro et Ouattara, il n'y a aucun problème.
Y.DOUMBIA
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Yacouba Doumbia
Journaliste Reporter
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