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Gbagbo sur Joël N’Guessan : "Il a témoigné contre moi à la CPI, aujourd’hui il passe devant les juges"

Publié le : 20 juin 2025 par Samuel KADIO

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L’ancien président de la République, Laurent Gbagbo, a évoqué l'arrestation de Joel N'Guessan, ex-ministre RHDP

L’ancien président de la République, Laurent Gbagbo, a évoqué l'arrestation de Joel N'Guessan, ex-ministre RHDP

Le 19 juin 2025 à Abidjan, Laurent Gbagbo a interpellé le pouvoir en place en citant le cas de Joël N’Guessan, ex-ministre RHDP arrêté pour avoir mis en cause la justice ivoirienne.

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Laurent Gbagbo n’a pas oublié. À l’occasion de la cérémonie scellant l’accord politique entre son parti, le PPA-CI, et le PDCI-RDA, l’ancien président de la République a profité d’un discours fleuve pour évoquer l'arrestation de Joël N’Guessan, ancien ministre des Droits de l’Homme et ex-porte-parole du RDR devenu RHDP, le parti au pouvoir.

« Regardez Joël N’Guessan, qui est leur gars, qui a passé son temps à m’insulter et qui est allé à la CPI témoigner contre moi. Joël N’Guessan, il passe aujourd’hui au tribunal devant les juges. Vous voyez ? », a lancé Gbagbo devant un public composé de journalistes et de cadres des deux plus grands partis de l’opposition.

« Discrédit »

La phrase n’est pas gratuite. Ce même jour, le Procureur de la République près le tribunal de première instance d’Abidjan, Koné Braman Oumar, annonçait officiellement le placement sous mandat de dépôt de Joël N’Guessan, pour des propos tenus dans une interview publiée le 18 juin 2025.

Dans cette sortie médiatique, l'ex-président du Comité de gestion du Fonds de développement de la formation professionnelle (FDFP) dénonçait l’exclusion de la liste électorale des principaux leaders de l’opposition, dont Laurent Gbagbo (PPA-CI), Tidjane Thiam (PDCI-RDA), Guillaume Soro (GPS) et Charles Blé Goudé (COJEP), tous aujourd’hui écartés du processus électoral. Il accusait les magistrats d’être les premiers responsables de cette situation.

« […] Si demain, il y a des troubles, ce seront les magistrats les responsables, pas les hommes politiques », avait-il ajouté.

Le procureur estime que ces propos « jettent le discrédit sur des décisions de justice et sur l’institution judiciaire », et sont donc passibles de poursuites au titre des articles 179, 190, 273 et 275 du Code pénal. Une information judiciaire a été ouverte le 19 juin, jour même du discours de Gbagbo.

Verrouillage politique

L’ironie n’a pas échappé à l’ancien chef de l’État. Sa phrase, lancée comme une pique acérée, fait référence au rôle que Joël N’Guessan a joué lors de son procès devant la Cour pénale internationale (CPI).

En 2016, ce dernier avait volontairement choisi de témoigner « à visage découvert » contre Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé, affirmant vouloir « servir la vérité ». À l’époque, il déclarait notamment que « les victimes de Laurent Gbagbo doivent être vengées par la justice internationale », étant, pour lui, les seuls responsables de la crise post-électorale de 2010-2011.

Mais son audition à La Haye avait tourné à la valse-hésitation. Interrogé par la défense sur des extraits de son propre ouvrage non publié, Joël N’Guessan s’était embourbé, multipliant les « je n’ai pas souvenance », jusqu’à ce que le président de la Cour, le juge Tarfusser, lui intime de garder son calme et de répondre clairement.

En mars 2021, alors que Gbagbo et Blé Goudé venaient d’être acquittés définitivement par la CPI, Joël N’Guessan insistait encore sur la nécessité de « repentance » : « Il faut qu’il [Gbagbo] se mette dans une posture de repentance, parce qu’il y a eu 3 000 morts. »

Aujourd’hui, les rôles semblent inversés. Mais pour Laurent Gbagbo, le cas Joël N’Guessan illustre une dérive plus large : la mise au pas de la justice au profit d’une stratégie de verrouillage politique. « Si on ne laisse pas aux autres la capacité de se battre pour être au pouvoir aussi, ce n’est plus la démocratie », a-t-il insisté plus tôt dans son discours.

« Vous êtes au pouvoir et vous décidez que tous vos adversaires ne sont pas candidats. C’est quoi ça ? Ce qu’on voit là, c’est un retour déguisé au parti unique », a-t-il encore dénoncé, appelant à la résistance face aux exclusions politiques.


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Article rédigé par

Samuel KADIO

Journaliste Reporter

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