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Arrêts des bus devant le Chu de Cocody: Le terminus de la mort !
Publié le : 27 février 2013 par M'Bra Konan
les étudiants qui prennent d’assaut les autobus devant le Chu de Cocody ne sont pas à l’abri d’un drame Ph : M.K.
Le lundi 3 septembre 2012, à l’ouverture officielle de l’Université Félix Houphouët-Boigny de Cocody (U-Fhb) après environ deux ans de fermeture, les responsables interdisaient l’accès des véhicules de transports, notamment les autobus de la Société des transports abidjanais (Sotra), au campus.
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Ils étaient loin de s’imaginer les graves conséquences et drames que cette mesure allait créer dans le milieu des étudiants qui côtoient la mort au nouveau quai d’embarquement, en face du Chu de Cocody, tous les jours.
Le vendredi 15 février 2013, peu après 16h30mn, une ambiance électrique règne à la rue devant le collège méthodiste (en face du Chu de Cocody). Des milliers d’étudiants sont dans les rangs qui serpentent ladite rue jusqu’à l’entrée de l’Université. Le service d’ordre imposé par les étudiants eux-mêmes a dû mal à faire son travail. Les cris et les appels à respecter scrupuleusement les rangs ne parviennent pas à tous ces étudiants qui se bousculent pour avoir accès aux bus des lignes 85, 49, 53 qui s’apprêtent à partir.
Le décor est le même depuis le mois de septembre. Un engorgement, un manque d’autobus et la forte chaleur en ce lieu font monter la colère et créent un désordre difficilement maîtrisable. Bienvenue au terminus des autobus de la Sotra qui desservent le campus de l’Université Fhb qui ont été priés de débarquer tout le monde sur cette petite côte. Ce terminus est de loin le plus craint, parce qu'il a été à l’origine de plusieurs drames.
De fait, le lundi 12 novembre 2012, en ce lieu, Paré Moussa, étudiant à l’institut Sainte Marie de Cocody, venu emprunter le bus pour rentrer chez lui, a trouvé une mort horrible. Il a été écrasé par un bus. Deux autres étudiants n’auront pas hélas la chance comme Paré, écrasés à leur tour, les semaines qui ont suivi. La Sotra a confirmé l’information lors d’une rencontre avec les étudiants sur le site.
Quant aux blessés, officiellement, on dénombre neuf du côté de la Sotra, là où les étudiants voient presque le double. Cela dit, plusieurs blessés qui sont aujourd’hui des handicapés à vie dont Boka Kouakou Charlesétudiant en licence 2 de géographie, amputé de la jambe gauche. Azo Maruis, Camara Youba et Kipré Jean Yves tous étudiants en licence 2 de philosophie sont les dernières victimes. En effet, ils ont été fauchés, le samedi 16 février 2013 par un véhicule incontrôlé après avoir percuté un taxi communal, sur le même espace, alors qu’ils étaient dans le rang, attendant un autobus pour se rendre chez eux.
La colère
Devant ce quotidien tragique qu’est devenu l’arrêt du Chu de Cocody pour les milliers d’étudiants, la colère monte. Si les responsables de l’Université ont réussi, tant bien que mal, à étouffer deux importants foyers de contestation devant la présidence, les étudiants n’ont, pour autant, pas cessé de revendiquer lorsqu’ils sont approchés. C’est le cas de Veh Nasse Eric, en faculté d’Espagnol. « Les autorités ont été mal inspirées. Nous qui par exemple venons d’Abobo, le 49 (la ligne des bus, ndlr) n’est jamais disponible. Nous marchons du Plateau Dokoui jusqu’à Angré au Terminus 81 pour espérer rallier le campus. Ceci est révoltant et ils inacceptable.
Avec une telle débauche d’énergie matinale, il est difficile de se concentrer pour les études », a-t-il protesté. Koffi A. qui se dit étudiant en Criminologie n’a pas non plus caché son inquiétude. « Nous sommes exposés au soleil et à la pluie. Le Rwanda et le Libéria ont connu la guerre, mais n’ont pas maltraité et exposé leurs étudiants après la crise. Pourquoi ce sont les étudiants qui doivent être les moutons de sacrifice ? Si les étudiants doivent venir se griller au soleil ou être trempés sous la pluie, après avoir fait des cours dans le gazon, je crois qu’il ne fallait pas se précipiter pour ouvrir les universités », s’est-il emporté.
Quant à Yao Kouamé Michael, étudiant en Physiques-chimie, il a déploré le manque de sécurité sur fond de colère : « il y a trop de difficulté. Monter chaque jour la côte à l’entrée ou à la sortie de l’université et la redescendre n’est pas chose facile. Nous sommes également exposés et il n’y a aucune sécurité. C’est dangereux tout cela ! ». L’un de ses copains, Kouassi Borris de la même faculté a décrié le manque de bus qui en rajoute à la nervosité : « Les bus ne sont pas réguliers » Devant le risque que représente le terminus du Chu, certains étudiants ont décidé d’opter pour les taxis communaux, intercommunaux ou mini-cars, quitte à dépenser plus. C’est le cas de Pascaline, étudiante en Sociologie. « Nous n’avons pas de sécurité sur ce quai improvisé. Devant le danger permanent, j’ai décidé de ne plus emprunter de bus, mais le gbaka ou les wôrô-wôrô (taxis, ndlr) », a-t-elle soutenu.
Causes
Les étudiants, dans leurs récriminations ont évoqué des causes qui engendrent les accidents. La distance et les conditions inappropriées des arrêts des bus qui sont sur la voie express. « Je suis en criminologie. Entre le Chu et ma faculté, c’est une distance d’environ deux kilomètres. Je dois faire cette distance deux fois, le matin et lorsque j’ai fini, soit environ quatre kilomètres pour venir emprunter un autobus.
Franchement, ceux qui ont pris la décision de changer le quai d’embarquement et de débarquement des bus ont été mal inspirés », a relevé Claver. Il a été soutenu dans sa position par Angèle en Espagnole : « Nous sommes dans les environs de l’Ecole nationale supérieure (Ens). Et nous devons parcourir, par jour, environ quatre kilomètres. Au quai, il faut se serrer les coudes pour espérer avoir un autobus pour rentrer à la maison, après trois heures d’attente. Cela nous épuise plus que les études. Et physiquement tout le monde ne peut supporter » Si ces étudiants ont abordé la distance entre le quai et les amphis, certains de leurs camarades se sont inquiétés pour les intempéries et un climat des plus rudes. « Nous sommes exposés au soleil et à la pluie. Je sors d’un paludisme et je suis obligé de venir m’aligner. J’ai réservé ma place dans le rang, derrière mon camarade », a témoigné Jean, étudiant en physiques-Chimie qui s’est abrité sous les parasols des vendeuses de friandises
Aux difficiles conditions d’études, se sont ajoutées celles du déplacement pour des milliers d’étudiants de l’université Fhb qui ne devraient avoir accès à leurs amphis situés pour la plupart à au moins un kilomètre à pied. Pour venir à l’université ou repartir chez eux, ils doivent donc se battre au risque de leur vie. Cinq mois après l’ouverture de l’université Félix Houphouët-Boigny, il y a eu plus de victimes (tués et blessés) que les deux dernières années académiques.
Les bus électriques, est-ce la solution ?
Le mercredi 20 février 2013, les autobus électriques, annoncés en grande pompe, en juillet 2012 étaient arrivés. D’ailleurs, les premiers essais ont commencé ; ce mercredi, avec deux des quatre (4) navettes offertes par le groupe Bolloré. Les conducteurs arrivés de la France, resteront à Abidjan jusqu’au mois de mars pour former leurs collègues ivoiriens sur les voies déjà établies, à savoir les accès et sorties de l’Université Fhb. En tout cas, étudiants et professeurs y auront droit.
S’il est démontré par les spécialistes que ces navettes présentent des avantages certains, à savoir écologiques, environnementaux et économiques (la consommation électrique est moins chère en comparaison au carburant), elles ne résolvent pour autant pas le problème des étudiants. « On nous parle de navettes. Oui, mais ces navettes ne feront qu’au plus un ou deux kilomètres pour nous déposer dans les terminus dont le fameux terminus du Chu où il y a eu déjà des morts et des blessés. Il est préférable de ramener le quai dans le campus », a pesté, Jules Claver, étudiant en Criminologie. Mieux, quatre navettes pour des milliers d’étudiants, beaucoup devraient patienter au quai ou devant leur amphi. « Un bus débarque environ deux cents étudiants.
Ce sont deux ou trois bus qui arrivent en même temps. Croyez-vous que tout ce monde aura de la place dans ces navettes qui ne peuvent embarquer cent cinquante personnes à la fois. Autant partir et revenir à pied du campus », s’est désolée Marie-Laure, étudiante en Espagnol. Ces navettes ne seront pas disponibles avant Pâques, a confié un expert, car « Il faut installer des bornes électriques ».
M’BRA Konan
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