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Dette des pays en développement : pourquoi la CNUCED réclame des réformes immédiates

Publié le : 17 mars 2025 par Samuel KADIO

Alors que la dette des pays en développement atteint des niveaux critiques, la CNUCED tire la sonnette d'alarme et plaide pour des réformes immédiates du système financier international. Lors de l’ouverture de la 14e Conférence internationale sur la gestion de la dette ce lundi, Rebeca Grynspan a dénoncé un cadre inadapté aux défis actuels et proposé des solutions concrètes pour éviter un effondrement économique dans de nombreux pays.

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La Conférence internationale sur la gestion de la dette a ouvert sa 14e session à Genève ce 17 mars 2025, sous l'égide de la Commission des Nations Unies pour le commerce et le développement (CNUCED). Dans un contexte mondial marqué par une crise de la dette sans précédent, Rebeca Grynspan, Secrétaire générale de la CNUCED, a posé les bases d'un débat crucial sur l'avenir de la gestion de la dette souveraine et son impact sur le développement.

Selon elle, la dette publique des pays en développement atteint des niveaux alarmants. "Nos données montrent que 3,3 milliards de personnes vivent dans des pays qui consacrent plus d'argent au service de la dette qu'à la santé ou à l'éducation", a-t-elle révélé. Ce constat souligne la difficulté pour ces États de concilier remboursement de la dette et financement du développement.

Une architecture financière obsolète

En 2023, le service de la dette représentait en moyenne 16 % des recettes d'exportation des pays en développement, un chiffre bien supérieur aux 5 % préconisés par l'Accord de Londres de 1953 pour la reconstruction de l'Allemagne. Cette situation met en évidence une vulnérabilité structurelle exacerbée par des facteurs exogènes : la COVID-19, les effets du changement climatique, les tensions géopolitiques et la hausse des taux d'intérêt mondiaux.

Rebeca Grynspan, Secrétaire générale de la CNUCED - DR

Le système financier international actuel ne semble pas préparé à répondre à ces défis. Comme l'a souligné Rebeca Grynspan, "le Cadre commun et les tables rondes du FMI vont dans la bonne direction, mais ils se sont avérés trop lents, trop complexes et d'une portée trop limitée". Le cas de la Zambie, qui a attendu quatre ans pour compléter sa restructuration, illustre bien cette lenteur. L'Éthiopie, quant à elle, attend encore.

L'une des principales difficultés réside dans l'évolution du paysage des créanciers. Aujourd'hui, près des deux tiers de la dette des pays en développement sont détenus par des créanciers privés, dont les motivations et les attentes diffèrent de celles des institutions multilatérales. Ces investisseurs exigent souvent des taux de rendement élevés et n'hésitent pas à intenter des actions en justice agressives en cas de retard de paiement. Cette situation complique encore la résolution des crises de la dette.

Des réformes urgentes et nécessaires

Face à ces défis, la CNUCED propose des solutions concrètes. L'une des principales initiatives annoncées lors de cette conférence est le lancement de la nouvelle version du Système de gestion de la dette et d'analyse financière (SYGADE 7). Cet outil, développé depuis plus de 45 ans, est déjà utilisé par plus de 61 pays. La nouvelle version améliore la transparence, la bonne gouvernance et l'efficacité de la gestion de la dette.

"Sans données précises et facilement accessibles, il est impossible de prendre des décisions éclairées et de négocier efficacement avec les créanciers", a rappelé Grynspan. SYGADE 7 permet ainsi aux pays de mieux comprendre leur structure d'endettement et d'anticiper les risques financiers.

Par ailleurs, la CNUCED plaide pour des réformes plus profondes du système financier international. L'une des propositions phares est la mise en place d'un "moratoire sur les taux d'intérêt pendant les négociations" de restructuration. Une telle mesure permettrait d'éviter que les pays en difficulté ne sombrent davantage dans le surendettement avant même qu'une solution ne soit trouvée.

Un enjeu majeur pour le développement

Au-delà des considérations purement financières, la question de la dette souveraine est un enjeu de développement. Comme l'a indiqué la Secrétaire générale de la CNUCED, "les pays en développement sont confrontés à un choix inacceptable : faire défaut sur leur dette ou sur leur développement". Cette alternative dramatique met en péril les objectifs de développement durable fixés par l'ONU.

L'urgence est donc de développer une architecture financière internationale plus résiliente et plus équitable. La Conférence sur la gestion de la dette entend jouer un rôle de premier plan en proposant des réformes concrètes et en facilitant le dialogue entre les différents acteurs du système financier mondial.

Alors que la communauté internationale se prépare pour la Conférence de financement du développement (FFD4) à Séville dans trois mois, la 14e Conférence sur la gestion de la dette marque une étape décisive. Les discussions qui s'y tiennent devraient alimenter les réflexions sur la création d'un "système financier multilatéral capable de fournir des ressources à long terme abordables à grande échelle".



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Article rédigé par

Samuel KADIO

Journaliste Reporter

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