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Électricité en Afrique de l’ouest :Ce qui se passe au Bénin et au Sénégal .La place des énergies renouvelables
Publié le : 17 octobre 2016 par Linfodrome
Stage d’immersion dans cinq capitales d’Afrique de l’ouest pour appréhender le secteur de l’électricité dans la sous-région et exporter les meilleures pratiques. Tel est l’objectif de ce périple organisé par l’Autorité de régulation du secteur de l’électricité en Côte d’Ivoire (Anaré CI) au profit des journalistes et leaders d’associations des consommateurs de Côte d’Ivoire du 11 au 26 octobre 2016. Bénin et Sénégal sont les premières étapes.
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Une heure par jour de temps de coupure d’électricité. Une situation qui s’est « considérablement » améliorée, à en croire Gbêdonougbo Claude Gbaguidi, président de l’Autorité de régulation de l’électricité (Are) du Bénin, quand la délégation ivoirienne conduite par l’Anaré Côte d’Ivoire lui a rendu visite, le 12 octobre 2016. Le délestage pouvait durer plusieurs jours. Il a expliqué que le secteur électrique du Bénin est fortement dépendant (à 90%) des importations d’énergie, du Nigeria et de la Côte d’Ivoire, notamment. Une société, la communauté électrique du Bénin, appartenant au Togo et au Bénin est chargée de la production et le transport. « Elle avait un rôle initialement d’acheteur unique. En 2003 le code de l’électricité a été révisé qui permet l’ouverture du marché et aux opérateurs privés de pouvoir s’insérer dans la filière de la production. A ce jour, nous n’avons pas encore de producteurs indépendants. Mais d’ici 2018, des opérateurs pourront arriver, notamment dans la production de l’énergie thermique », a-t-il souligné.
On dénombre 700.000 abonnés à l’électricité dans ce pays où la demande est estimée à 200 Mw. « Le kilowatt/heure coûte entre 105 et 111 francs Cfa », a fait savoir le régulateur. Qui a ajouté que cette autorité est directement rattachée à la présidence de la République et son budget dépend de l’État. « Elle a pour mission de veiller sur l’équilibre du secteur et son développement harmonieux ; à la continuité et à la qualité de service pour l’intérêt général des consommateurs. Elle veille aux contrats d’achat-vente entre les producteurs indépendants et l’État », a noté M. Gbêdonougbo. Pour sa part, Dona Jean Claude Houssou, ministre de l’énergie, de l’eau et des mines du Bénin, pense qu’il faudra tôt ou tard payer le prix réel de l’électricité.
« Quel que soit le pays où on se retrouve dans la sous-région, le problème de l’électricité est plus que crucial. Depuis le 7 avril nous sommes dans une dynamique extraordinaire pour définitivement enrayer le délestage et toutes les difficultés sur la qualité de l’électricité. On a mis en place un comité stratégique de pilotage d’un plan de redressement dans le secteur qui travaille avec acharnement et qui est chargé, d’ici la fin de l’année de proposer au gouvernement un plan global d’actions. Il y a un mois, le comité a présenté les 8 composantes qui balaient tous les domaines du secteur : augmentation de la capacité des énergies, le réseau, le transport, développement des capacités, les relations avec le régulateur, etc. Il faut arriver à instaurer dans ce pays, une dynamique nouvelle qui permet d’avoir une vision lointaine et avoir de l’anticipation », a-t-il soutenu. Pour lui, le domaine de l’énergie doit être stabilisé ; où on sait où on va et tout ce qu’il faut pour y aller.
« Si on veut être de grands pays, il faut que le secteur de l’électricité soit stable où on a un régulateur qui joue son rôle et à qui on donne les moyens d’avoir l’autonomie nécessaire pour assumer cette responsabilité. Et qu’on ait aussi des consommateurs ou des défenseurs de consommateurs qui savent ce qui se passe dans le secteur, qui savent quels sont les fondamentaux de ce secteur. On ne peut pas jouer avec les fondamentaux qui sont incontournables. Les populations disent que l’électricité est chère. Si je leur réponds qu’aujourd’hui elles ne paient même pas la moitié de cette énergie. Nous avons une entreprise qui s’appelle Société béninoise d’énergie électrique (Sbee) qui est déficitaire, sous perfusion. Ce n’est pas comme cela qu’on peut garantir la viabilité, la durabilité d’une société, d’un secteur aussi vital pour notre développement. A un moment donné, on a besoin de s’asseoir, de mettre les choses sur la table et en discuter. Pour savoir si on veut être dans un système où l’état doit être en permanence en train de perfuser ou de l’autre côté, on parle de la vérité des prix et on fait en sorte que ça fonctionne comme une entreprise normale, équilibrée avec ses fondamentaux sains. A commencer par l’État de payer ce que doivent ses ministères. Depuis 4 jours on a coupé l’électricité au stade de l’amitié, qui est le plus grand stade. C’est la première fois que cela arrive. On donne des leçons. Voilà une institution qui doit 60 millions de francs Cfa et qui alimente également tous les commerces autour du stade et qui se fait payer mais qui ne paie pas les fournisseurs d’électricité. C’est un premier pas. Très prochainement, on va mettre sur la table, concrètement qui doit quoi à qui ? On me dit, l’État nous doit 18 milliards de francs Cfa. Je dis d’accord mais depuis 2014, tous les mois, l’État met 2 milliards pour vous acheter le combustible. Si je fais le calcul, l’État sort 48 milliards. Qui doit à qui ? A un moment donné, il faut qu’on mette les choses sur la table que définitivement on se demande quel est l’ambition de notre pays, quel est la responsabilité qu’on veut prendre ? Quel est le mécanisme à mettre en place si on veut que la Sbee soit une société « normale » comme les autres. C’est une décision politique. Mais au-delà de tout, il faut savoir qu’on doit passer par la case de départ qui est la vérité des prix, des tarifs. On ne peut pas se voiler les yeux », s’est-il voulu clair.
Le ministre Dona a fait remarquer que du fait du délestage, les populations béninoises n’arrivent pas à faire des réserves d’eau. Ce qui veut dire que quand il y a coupure d’électricité, il y a coupure d’eau. Puis, il a déploré le manque de compétitivité de la société d’État chargé de la distribution de l’électricité. « Quand on arrive dans les agences, il y a de longues queues de personnes qui viennent payer et à qui on dit, après de longues heures d’attentes qu’il n’y a plus de connexion, on ne peut pas prendre votre argent, revenez demain. Voilà une société qu’on appelle entité publique à vocation industrielle et commerciale (Epic) Ce que j’ai vu en arrivant c’est que le C est mort. Mais, il faut qu’on le ressuscite, ensemble. Il y a des fondamentaux qu’il faut absolument respecter. Cela peut être dans la douleur, mais on ne peut pas s’y soustraire. Il faut qu’on arrive à respecter la vérité des tarifs et à sensibiliser les consommateurs pour optimiser sa consommation d’électricité ; c’est aussi le passage à Led pour baisser la consommation des ménages. La démarche est tôt ou tard incontournable, celle qui va consister à avoir la vérité des tarifs. On est dans des pays à modèle capitaliste où les gens entreprennent, investissent l’argent. Il faut que cela leur rapporte un peu, du moins qu’ils n’en perdent pas. Il faut quand on vend un produit, assurer au moins les charges et garantir un petit bénéfice pour celui qui a investie. Ce sont les fondamentaux. Il faut que l’électricité puisse être disponible à tout moment », a-t-il dénoncé. Faut-il alors procéder à la privatisation de Sbee ? Toutes les options sont possibles. Ça peut être une gestion déléguée, un affermage, etc. », a-t-il répondu.
L’énergie solaire au Sénégal
Contrairement au Bénin où le tarif de l’électricité est fixé par l’État, au Sénégal, cette mission est dévolue à la Commission de régulation du secteur de l’électricité (Crse) après consultation des populations. Et pourtant, à Dakar, on crie à la cherté de l’électricité. Le prix du kilowatt/heure étant fixé à 117 francs Cfa. Ici, l’électricité étant à 90% produite par des centrales thermiques. Une situation qui rend l’approvisionnement fortement dépendante des fluctuations des coûts mondiaux du baril de pétrole. En 2001, le taux d’énergie non fournie pour manque de production était de 226Gw/h. Aussi, pour satisfaire la demande, ce pays s’est orienté vers le développement des énergies renouvelables, surtout en zones rurales. Aussi, une agence, Aner (Agence nationale pour les énergies renouvelables) a-t-elle été créée à cet effet.
Un vaste projet de de 50.000 lampadaires solaires et d’équipement des bâtiments administratifs (hôpitaux, Universités, commissariats de police ou brigade de gendarmerie, etc.) en cette source d’énergie est en cours. Une expérience très enrichissante. « Il est important de diversifier la production, avec le mix avec plusieurs sources : le gasoil, le gaz, le charbon et le solaire. Dans cette diversification, il y a un objectif de 20% pour les énergies renouvelables, le solaire et l’éolien. C’est dans ce cadre-là que nous avons développé le solaire. Nous avons 5 projets solaires d’une puissance de 150 Mw et le projet éolien de 50Mw. Mais, au-delà, il faut faire en sorte que les populations puissent produire de l’électricité pour leur propre consommation. Nous accompagnons les ménages pour avoir des installations solaires pour leur propre consommation. Nous travaillons également à mettre en place le mécanisme de financement pour faire en sorte qu’elles puissent avoir les financements parce que l’investissement de base est assez lourd même si l’amortissement se fait rapidement, entre 4 et 5 ans. Nous les accompagnons pour qu’elles puissent avoir des équipements de qualité parce que les marchés sont inondés de produits de mauvaise qualité et qui pourraient ternir l’image du solaire. Nous veillons également à la qualité en donnant des certifications aux importateurs et à la mise en place d’un laboratoire de contrôle de la qualité », a fait savoir Djiby Ndiaye,
Directeur général de l’Aner. Outre les ménages, cette structure accompagne les populations dans les domaines productifs. « Dans l’agriculture, avec l’utilisation des motos-pompes, l’approvisionnement en gasoil pose problème souvent. Le coût d’exploitation est très élevé. Les groupes de femmes qui travaillent dans les unités de transformation de séchage du poisson. Il y a un problème d’hygiène, de temps de séchage et de rendement », a-t-il indiqué. De même, dans l’élevage, un projet de tentes solaires a été lancé au profit des populations des zones enclavées, notamment pour permettre la conservation des produits laitiers. Mais, pour le Dg de l’Aner, il faut toutefois tenir compte des coûts de production de l’électricité. « Nous avions ici, à un moment, des coûts moyens de production de l’électricité de près de 140 francs le kilowatt/heure. Or, le coût de vente du solaire est à 105 francs Cfa. Au Sénégal l’énergie solaire n’est pas plus chère que le conventionnel.
Mais, dans certains pays, comme la Côte d’Ivoire le coût de l’électricité est beaucoup plus bas, à 32 francs. Celui qui achète l’électricité à 32 francs peut ne pas être intéressé par le solaire contrairement à celui qui achète à 105 francs », a-t-il fait observer. Notons que 88% des zones urbaines sont électrifiées contre 31,5% en milieu rural. Le défi est d’atteindre un accès universel à l’horizon 2025. Après le pays de la Téranga, cap est mis sur Bamako ce lundi, puis Accra et Conakry.
Jonas BAIKEH
(Envoyé spécial)
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