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Sommet de Séville 2025 : Comment repenser l'agriculture et la dette de l’Afrique ?

Publié le : 30 juin 2025 par DJOMANDE Aziz

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MOHAMED EL-GHAZOUANI PRESIDENT DU L'UA (PH:DR)

Du 30 juin au 3 juillet 2025, Séville sera le centre du monde pour la quatrième Conférence internationale sur le financement du développement, organisée sous l’égide des Nations unies. Dix ans après l’Agenda d’Addis-Abeba, cette rencontre intervient dans un climat mondial traversé par de profondes turbulences : endettement croissant, inégalités persistantes, bouleversements climatiques, sans oublier la remise en cause des modèles classiques d’aide au développement.

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Les enjeux sont multiples : agriculture, gestion de la dette, souveraineté alimentaire, transparence fiscale. Mamadou Goïta, socio-économiste malien et directeur exécutif de l’Institut de recherche et de promotion des alternatives pour le développement (Irpad), figure parmi ceux qui appellent à une réflexion en profondeur. « Il ne s’agit pas de se contenter d’un exercice de style diplomatique, mais bien de poser les vraies questions », souligne-t-il, insistant sur la nécessité d’éviter les répétitions du passé.

Dette et agriculture : Les priorités africaines

La question de la dette occupe une place centrale dans les discussions. Dans de nombreux pays africains, une part importante du budget national est absorbée par le remboursement d’emprunts contractés à des conditions souvent peu avantageuses. Cette situation limite la capacité des États à investir dans des secteurs essentiels tels que l’éducation, la santé ou l’agriculture.

Pour Mamadou Goïta, il devient urgent de réorienter les flux financiers, notamment en faveur de prêts concessionnels mieux adaptés aux réalités locales. « En Afrique de l’Ouest, le taux de rentabilité interne de l’agriculture avoisine les 7%. Il serait donc pertinent de proposer des financements à des taux inférieurs pour permettre au secteur agricole de se développer durablement », explique-t-il.

L’agriculture, justement, demeure le parent pauvre des politiques de financement, alors que plus de 60% de la population africaine en dépend directement. Goïta plaide pour une approche globale : il ne suffit pas de soutenir la production, il faut également investir dans la transformation, le stockage, le transport et la distribution. C’est à cette condition que les produits locaux pourront véritablement bénéficier aux populations.

La souveraineté alimentaire s’impose aussi comme une préoccupation majeure. Elle ne signifie pas l’autarcie, mais suppose la capacité de décider collectivement des priorités de production et de consommation. Cela implique également une révision des politiques commerciales afin de protéger les marchés locaux des importations massives susceptibles de fragiliser les filières nationales.

Transparence, dialogue et agroécologie : Les nouveaux chantiers

Au-delà des questions financières, la transparence fiscale et la lutte contre les flux illicites retiennent l’attention. Chaque année, près de 1 000 milliards de dollars échappent aux pays en développement, des ressources qui pourraient être mobilisées pour soutenir la réalisation des Objectifs de développement durable. Une coopération internationale renforcée dans ce domaine est attendue à Séville.

La gouvernance des politiques de développement constitue un autre enjeu. Mamadou Goïta insiste sur l’importance de préserver et de renforcer les espaces de dialogue entre les différents acteurs : États, sociétés civiles, syndicats, chercheurs, peuples autochtones. Des plateformes comme le Comité pour la sécurité alimentaire mondiale (CSA) permettent de faire émerger des priorités partagées, mais restent fragilisées par des initiatives parallèles qui tendent à privilégier certains intérêts privés. Enfin, l’agroécologie, longtemps marginalisée, gagne du terrain. Goïta observe que dans les régions où elle s’implante, les résultats sont encourageants, à condition de garantir aux producteurs un accès sécurisé à la terre, aux semences et aux marchés.

Le secteur privé, souvent présenté comme un moteur potentiel de développement, doit cependant s’inscrire dans une dynamique respectueuse des choix souverains des États et des organisations paysannes. Les pays du Sud espèrent voir émerger des solutions concrètes et adaptées à leurs réalités. Reste à savoir si les discussions à Séville permettront d’ouvrir une nouvelle page pour le financement du développement, en phase avec les besoins des populations et les défis du XXIe siècle.


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Article rédigé par

DJOMANDE Aziz

Journaliste Reporter

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